Dans le cadre de la grande collecte lancée en novembre 2013, Madame Annie Borra nous a confié des documents sur son père, Emmanuel Favrel, figure incontournable de Beaune, afin de les numériser.
Emmanuel Favrel est né le 11 janvier 1896 à Corlée dans le canton de Langres, il sera mobilisé le 1er avril 1915, et versé au 21ème bataillon de chasseurs à pied qui, à cette époque, stationnait à Langres.
Un témoignage d’Emmanuel recueilli par un élève d’un lycée dijonnais racontant ses premiers mois au front fait partie des documents déposés par Mme Borra, il nous apprend énormément de choses sur le parcours du soldat, et la narration à la première personne nous plonge au cœur de l’expérience de M. Favrel : « Je fis mes classes jusqu’au mois de novembre. A la suite de la bataille de Verdun qui fit beaucoup de victimes, nous partîmes en renfort. Les volontaires étaient désignés par ordre alphabétique, et comme mon nom commence par F, je fus dans les premiers à partir. Nous rejoignîmes le bataillon qui descendait de Verdun, près de Bar-le-Duc, dans la campagne, parce qu’il n’y avait pas de caserne, je fis donc le front de Champagne pendant l’hiver 1915-1916 et au mois de juin nous partîmes dans la Somme en renfort (…)». Le 13 septembre, Emmanuel est blessé. Il raconte que les allemands contre-attaquèrent en pleine nuit alors qu’il arrivait en première ligne pour assurer la garde. S’apprêtant à lancer une grenade, il reçoit un éclat d’obus dans le biceps droit. Il explique « Je n’ai eu qu’une peur : être prisonnier blessé, car je savais que bien souvent, on les laissait mourir ».
Emmanuel est amputé du bras droit le 19 septembre 1916. Il part ensuite dans un hôpital de l’arrière à Orléans, où il retrouve sa cousine, Gabrielle, qui est infirmière. Celle-ci lui sera d’une grande aide durant sa convalescence. Emmanuel sera cité plusieurs fois, obtiendra la Croix de Guerre, ainsi que la Légion d’Honneur en 1937. Il ne sera officiellement reformé que le 4 juillet 1919.
Son retour à la vie civile ne se fait pas sans difficultés. Les médecins tenteront de l’appareiller, mais Emmanuel ne portera pratiquement jamais sa prothèse. Ce n’est qu’en septembre 1922 qu’il obtiendra un emploi de garçon de bureau à la Compagnie des Chemins de Fer de l’Est. Aidé par un oncle habitant Beaune, Emmanuel retrouve la force de mener une existence « normale » et rentre à la maison Latour. Il se marie et aura 5 enfants. Il sera extrêmement actif dans le milieu associatif beaunois : il sera notamment le président de la sidi-Brahim de Beaune, le président de la Section de Beaune des Amputés de guerre et le vice-président du Comité de la Société d’Entraide de la Légion d’Honneur de Beaune.
Il décède en juillet 1975, alors qu’il jouait aux cartes avec ses amis.
Sources : ©Archives Municipales de Beaune- Prêt Borra
Photographies : ©Emmanuel Favrel -Prêt Borra