Dans la nuit du 14 au 15 avril 1912, le plus grand et luxueux paquebot jamais construit fait naufrage dans les eaux de Terre-Neuve après être entré en collision avec un iceberg. Parti le 10 avril de Southampton en Angleterre, il effectuait sa traversée inaugurale jusqu’à New-York. Dés le 16 avril, bon nombre de journaux nationaux et régionaux font état de la disparition du Titanic.
Le Journal de Beaune, et l’Avenir Bourguignon, les deux journaux beaunois de l’époque aux sensibilités politiques différentes (journal progressiste pour le premier, conservateur pour le second) ont bien entendu eux aussi rapporté cet événement.
Dés le 16 avril, l’Avenir Bourguignon reprenant les premières dépêches, annonce dans son article « Iceberg contre transatlantique », présent en deuxième page de son édition, qu’ « un très grave accident qui aurait pu devenir une effroyable catastrophe est arrivé au gigantesque paquebot Titanic (…) » Les premières dépêches se basent en effet sur la réponse de la Compagnie White Star apportée à un télégramme du lundi soir (le 15 avril à 20h45) de M. James A. Hughes, membre du congrès, dont la fille était à bord. Le journal fait espérer que tous les passagers ont été sauvés « Le Virginian a pu porter secours à temps au Titanic. Les passagers sont sauvés : à 3h30 du matin, ils avaient tous quittés le navire ». Le 18 avril, le journal annonce une toute autre version de la catastrophe et consacre une grande partie de sa une à l’événement. Dans les journaux du 20, 23, 25 et 27 avril et dans l’édition du 4 mai, l’Avenir Bourguignon revient sur le naufrage. Il annonce les bilans des pertes humaines (les chiffres définitifs varient de 1491 à 1513 morts, et d’environ 700 rescapés) et matériels, il consacre d’ailleurs une part assez importante de son article du 20 avril aux victimes françaises contrairement au Journal de Beaune qui lui, ne fait à aucun moment état des pertes subies par la France, il revient également sur le déroulement des événements et tente de comprendre ce qu’il s’est passé, il annonce dans les éditions des jours suivants, la mise en place d’une enquête pour connaitre les raisons de cette tragédie.
Le Journal de Beaune, quant à lui, attend le 18 avril (daté par erreur 16 avril), pour écrire son premier article. Il dénonce ainsi les informations erronées rapportées par les premières dépêches « Les premières dépêches faisaient espérer que tous les passagers et l’équipage avaient été sauvés (…) ces premières nouvelles, malheureusement étaient fausses ». Le 23 avril, le journal revient sur le naufrage, il décrit l’émotion de la capitale anglaise et dresse un premier bilan de la catastrophe. Il revient, le 27 avril, une dernière fois de façon très laconique sur le bilan des victimes (qui est loin de rejoindre la réalité) «On a retrouvé 205 cadavres sur le théâtre de la catastrophe du Titanic ».
Que ce soit dans L’Avenir Bourguignon ou dans le Journal de Beaune, une place importante est laissée à la mise en avant de héros, face aux chiffres des disparus et des rescapés, ces deux journaux nous livrent l’histoire de personnages héroïques ayant sauvé des vies en sacrifiant les leurs. Ils rapportent également des scènes vécues par les familles des passagers dès l’annonce de la tragédie ainsi que les jours suivants. Dés lors, une part importante des articles est consacrée à l’émotion suscitée par cette catastrophe, l’information n’est plus seulement basée sur des faits bruts et vérifiables, elle tente de séduire le lecteur.
Ces nombreux articles sur la catastrophe dans ses deux journaux locaux nous montrent assez bien la course à l’information déjà présente à cette époque, quitte a annoncer de faux événements. Ces journaux à l’impact géographique similaire n’informent pas leur lectorat de la même manière, ces deux visions traduisent tout de même la même chose : la vive émotion provoquée par la disparition de ce paquebot réputé insubmersible.
Sources :
– Journal de Beaune, avril 1912
– L’Avenir bourguignon, avril 1912
Crédit photo : Archives municipales de Beaune