L’affaire Julien Boulard : le vaillant poilu accusé de défaitisme

Julien Boulard, originaire d’Auxey-le-Grand – actuellement Auxey-Duresses- est mobilisé en décembre 1914, il entre au 85ème Régiment d’Infanterie de Cosne-sur-Loire.

Julien, comme la grande majorité des soldats au front, écrit beaucoup à ses parents. Il a la particularité de se montrer très vigilant dans les propos qu’il tient dans ses lettres. En effet, la censure postale sévit depuis le début de la guerre. Les soldats ne doivent pas dévoiler certaines informations militaires, mais ils ne doivent pas non plus tenir des propos subversifs (défaitisme, antimilitarisme, antipatriotisme…). Malgré cette retenue, Julien sera la victime d’un acte de dénonciation de la part d’un civil, qui l’accuse d’avoir « tenu des propos de nature à inquiéter l’opinion publique »...

Début mai 1916, Julien se trouve en permission à Auxey-le-Grand. Dans son carnet de guerre, il écrit le 8 mai « Deux jours avant mon départ pour le front, je reçois la visite de deux gendarmes. Ces messieurs étaient venus, d’après la dénonciation d’un individu de la commune, pour enquêter à mon sujet. Paraît-il, j’étais accusé de défaitisme. J’aurais dit que 44 batteries d’artillerie sur 45 avaient été démolies à Verdun pendant que je m’y trouvais »

Reprenons les faits : Le 8 mai 1916, un habitant d’Auxey-le-Grand se rend à la gendarmerie et informe les gendarmes qu’il avait entendu dire par un autre habitant que, la veille, Julien Boulard lui avait tenu les propos énoncés plus haut. Toujours le 8 mai, après avoir interrogé Julien, la personne qui aurait entendu ses propos, ainsi que d’autres membres influents de la commune, les gendarmes concluent qu’il s’agissait d’un acte de malveillance à l’encontre de Julien. Julien est en effet qualifié par les personnes interrogées, de « vaillant soldat » (qui venait en plus de recevoir la croix de guerre) et nient totalement le fait de l’avoir entendu tenir des propos alarmistes.

Le 10 mai, Julien repart sur le front. Le 12, il arrive à destination et écrit «En arrivant, je vais porter ma permission au bureau, et j’y trouve le capitaine de Poli et le chef, qui avaient déjà reçu tout le petit dossier me concernant, et qui paraissaient plutôt s’en amuser que d’y faire attention. Néanmoins ils m’ont questionné, pour savoir ce qui s’était passé et être renseignés sur cette histoire-là » Le chef et le capitaine ajoutent un commentaire au rapport de la gendarmerie après avoir entendu Julien et envoient ce rapport au colonel. L’affaire en restera là.

Julien demande, après que les officiers eurent quitté le bureau, l’accès à son dossier et ce n’est qu’à cet instant là qu’il apprend véritablement l’identité de son accusateur. Il s’agit d’une vengeance personnelle d’un individu à l’encontre de la famille Boulard. Une querelle de village qui aurait pu avoir de graves conséquences si Julien n’avait pas eu le soutien des membres du village et de ses supérieurs.

L’exposition « Censure et Propagande durant le Grande Guerre » est présente en salle de lecture des Archives de Beaune jusqu’au 11 novembre 2014.

Source : Archives Municipales de Beaune-Dépôt Briotet