Il y a parfois des querelles qu’on ne peut pacifier facilement. Nous avons affaire ici à deux plaintes, l’une d’un nommé Vollot, l’autre de M. Chicotot. Chacun porte plainte contre l’autre, une querelle épistolaire avec police et autorité beaunoise interposées. Au cœur de l’affaire : un troupeau de moutons venu de Chorey placé « illégalement » sur des terres de Beaune. La première lettre, datant du 19 avril 1845, vient de M. Vollot qui envoie pour la énième fois, selon lui, sa plainte contre M. Girard et se fait le porte-parole de toute la population beaunoise : « Depuis plusieurs années, j’ai été pour le cas de me plaindre à Monsieur votre prédécesseur, et ensuite à Monsieur le garde-champêtre, de la complaisance avec laquelle ces derniers permettaient que le troupeau de moutons de M. Girard de Chorey venaient journellement paître sur le finage de Beaune. Ma plainte n’ayant obtenu pour résultat que dédain et injures, j’ai été obligé de m’adresser au procureur général […] ». Ce dernier a communiqué la plainte au maire de l’époque qui n’a jamais donné suite à l’affaire. Depuis ce temps, M. Vollot se désespère de cette situation : « je viens vous prier de vouloir bien faire cesser cet abus qui depuis plus de dix ans a été de plus d’une manière vexatoire pour bien des habitants de cette ville […] »
M. Girard, propriétaire des moutons, est donc convoqué par le commissaire de police de Beaune, qui lui fait part des plaintes de M. Vollot. Ne pouvant se déplacer, c’est par la lettre d’un ami, M. Chicotot, qu’il se fait entendre. Ce dernier ayant lui-même quelques remarques à faire concernant les mœurs du sieur Vollot, discréditant ainsi les propos de ce dernier. Il écrit donc, ce 24 avril 1845 : « j’ai l’honneur de vous prévenir que rien ne m’étonne de la part de cet homme aussi vil que dépravé, car vous devez vous rappeler, monsieur le maire […] que ledit Vollot a été pris par le garde-champêtre Arnoux en flagrant délit avec une fille prostituée […] » Alors que ce malencontreux incident aurait pu tomber dans l’oubli, les enfants de M. Vollot sont mis au courant par le fils de M. Chicotot. Voulant éviter de couvrir leur famille de honte, les enfants de M. Vollot sont allés rendre visite à M. Chicotot, le suppliant de retirer le procès-verbal que lui avait infligé le garde-champêtre, « je leur ai rendu ce petit service et depuis ce temps, le sieur Vollot père n’a cessé de m’en vouloir d’avoir instruit sa famille de la conduite qu’il menait […] ». Quant à cette affaire de moutons, M. Chicotot dément les accusations faites à l’encontre de son ami M. Girard, affirmant que « l’autorité lui avait accordé de venir y faire pâturer ses moutons après une demande qu’il en avait faite […] ». Pour finir, M. Chicotot évoque la possibilité de porter plainte contre « le nommé Vollot », « afin de faire cesser de pareilles injures » et espère sincèrement que les autorités beaunoises sauront faire la part des choses.
Source : I1 §11 article 2, n°1