Par deux fois, Beaune reçoit la visite du frère de Louis XVI et Louis XVIII, le comte d’Artois, futur Charles X. Alors que Napoléon tente d’arrêter l’invasion de la France par la 6ème coalition, les troupes de l’armée autrichienne entrent dans Beaune dès le 28 janvier 1814. Déchu par le Sénat le 2 avril, Napoléon abdique au profit de son fils le roi de Rome mais le trône échoit à Louis XVIII, frère de Louis XVI.
A Beaune, le maire bonapartiste Jean-Baptiste Edouard doit loger 150 hommes et de nombreux chevaux. Il doit aussi organiser la réception du Comte d’Artois pour le 15 septembre. Il espère conserver son fauteuil municipal et s’est rallié au roi comme en témoigne le grand discours qu’il prononce au moment du changement de souverain, conservé au cœur des registres de délibérations municipales. C’est donc avec zèle qu’Edouard organise la visite princière.
Le futur Charles X descend avec les seigneurs de sa cour chez Marie-Thérèse Gauvain-Courtot, place Carnot puis est reçu par le maire, les représentants de la noblesse locale triomphante et quelques négociants. Une calèche est mise à sa disposition afin de parcourir les rues de la ville, entourée par sa garde d’honneur. La porte Saint-Nicolas est ornée des armes de la famille de France. Le Journal de la Côte d’Or du 24 septembre 1814 relate l’événement et rapporte, à sa manière, les réactions de la foule : « Dès que la voiture du Prince a été aperçue, le plus grand enthousiasme a éclaté au milieu de cette population ivre de bonheur et de joie ; les cris de Vive le Roi ! Vive Monsieur ! partoient de toutes les bouches : les larmes du plaisir inondoient tous les yeux. ». Les Beaunois étaient-ils si enthousiastes du retour des émigrés ?
Soudain, le 1er mars 1815 Napoléon débarque à Golfe-Juan et arrive au Palais des Tuileries le 20 mars. Louis XVIII se réfugie à Gand, en Belgique, tandis que le Comte d’Artois se rend à Lyon afin de stopper le « vol de l’Aigle ». La suite est connue, une nouvelle coalition est constituée, l’ultime bataille a lieu à Waterloo et la défaite de la Grande Armée sonne le glas du Premier Empire.
En juillet 1815, Beaune est de nouveau occupée par les troupes autrichiennes. Les réquisitions débutent et la ville n’est qu’au commencement d’un désastre économique. En effet, les dépenses d’occupations et les exigences draconiennes de l’occupant mettent la ville et ses habitants dans une situation critique. Et c’est lors de ce même mois de juillet 1815 que le comte d’Artois revient à Beaune. Il est accompagné du duc et de la duchesse d’Angoulême, fils et belle-fille du comte, ainsi que de Louis-Philippe, futur roi des Français en 1830. Jean-Baptiste Edouard, maire, est destitué et est remplacé par Nicolas Richard d’Ivry, ancien émigré. L’accueil réservé au comte d’Artois est beaucoup moins enthousiaste la seconde fois puisqu’il n’a pas tenu les promesses faites lors de son précédent passage, notamment l’abolition des droits réunis, impôt touchant en particulier le monde du vin. En outre, la présence autrichienne exaspère les tensions.
L’aristocratie beaunoise conservera le pouvoir municipal jusqu’à la chute de Charles X en 1830, date à laquelle Louis Routy de Charodon, maire de la ville démissionne et refuse de servir Louis-Philippe.
Sources : Séries D, H et Ph.
Dollinger Sonia, Les classes dirigeantes beaunoises 1789-1830, changement ou continuité ? Mémoire de maîtrise, UB, 1996.
Photographie 1Ph73.