Paul de Richard d’Ivry (Beaune, 1829 – Hyères, 1903)

un compositeur beaunois au XIXè siècle, un marquis musicien.

 

Paul d’Ivry est orphelin à douze ans. Après la disparition de son père, le jeune Paul est partagé entre la famille comtoise de sa mère et ses attaches bourguignonnes. Il passe son baccalauréat en 1847. A peu près dans le même temps, il commence tout seul l’étude de la musique et se forme par la lecture de quelques traités et l’étude des œuvres des grands maîtres, à l’abri du donjon du château de Coraboeuf à Ivry en Montagne.

En cette année 1847 qui le voit bachelier, il fait exécuter une ouverture de concert par la Société Philharmonique de Beaune puis écrit les paroles et la musique de son premier opéra en un acte intitulé Fatma, d’inspiration orientalisante. Il publie également quelques mélodies vocales. A cette époque, le jeune Paul devient l’élève de Maller, professeur d’harmonie, et reçoit les éloges de ses compatriotes beaunois : « tous ceux qui connaissent la musique du petit opéra qu’il vient d’achever s’accordent pour en faire l’éloge et il me semble ouïr déjà au théâtre de Lyon où doit être jouée cette œuvre de notre jeune maestro les applaudissements du public. » s’enthousiasme Simon Gauthey .

L’effervescence créatrice des années parisiennes :

Dès le début des années 1850, Paul d’Ivry effectue de fréquents séjours à Paris où son nom et son titre lui ouvrent les portes des salons. En 1851, le jeune homme connaît déjà Charles Gounod, comme en témoigne la lettre que celui-ci lui adresse le 27 juillet 1852 : « J’espère que vous viendrez bien nous demander quelque jour à déjeuner comme vous le faisiez l’hiver dernier. » Dans cette lettre, Gounod appelle le marquis « mon cher ami » et lui donne des nouvelles de son opéra Ulysse.

De 1851 à 1854, le jeune compositeur écrit plusieurs mélodies, ballades et villanelles teintées de romantisme comme L’Enfant Malade et l’Ame du Purgatoire, publiés en 1852.

En 1854, il se tourne à nouveau vers l’art lyrique et compose deux opéras comiques en un acte : Quentin Metzys et La Maison du Docteur. Pour cette dernière œuvre, Paul d’Ivry fait appel à un librettiste dijonnais : Henri Boisseaux. Cet opéra comique se situe tout à fait dans la veine des opérettes d’Offenbach. Plein d’enthousiasme, le jeune compositeur dédicace sa partition « à son ami Charles Gounod ».

La Maison du Docteur, après avoir été jouée en partie dans quelques salons, est donnée au théâtre de Dijon le 4 janvier 1855. Le Moniteur de la Côte-d’Or en donne une critique encourageante : « La romance d’Eva et le duo entre Toby et Lord Harley sont deux morceaux charmants qui suffiraient seuls pour révéler un talent que de fortes et persévérantes études peuvent conduire à des succès beaucoup plus élevés ». Fort de ces conseils et encouragé par l’accueil enthousiaste du public, Paul d’Ivry se fixe à Paris et prend des leçons de contrepoint auprès d’Aimé Leborne, Grand prix de Rome et professeur au Conservatoire de Paris, ainsi que des cours de composition auprès d’Aristide Hignard, également Grand prix de Rome et compositeur d’un Hamlet aujourd’hui oublié. Celui-ci donne peut-être à son élève le goût des textes de Shakespeare. Le jeune marquis commence à publier ses premières œuvres, dont La Maison du Docteur, chez l’éditeur parisien Choudens.

A partir de ce moment, Paul de Richard d’Ivry semble commencer à avoir une réputation dans le milieu musical puisque le Théâtre Lyrique lui commande un opéra en un acte. Pour répondre à cette demande, il compose donc Omphale et Pénélope en 1855, mais un changement de direction à la tête du Théâtre Lyrique fait rester l’œuvre dans ses cartons. Nullement découragé, Paul d’Ivry écrit encore quelques ballades comme l’Ondine en 1857 ou des mélodies romantiques comme L’Adieu à la Nourrice, la même année.

Durant cette période d’apprentissage, Paul de Richard d’Ivry pénètre apparemment sans peine les milieux littéraires et musicaux de Paris. Il fait la connaissance de Franz Liszt qui deviendra un conseiller et un ami. L’abondante correspondance du marquis révèle à quel point il est bien intégré dans la bonne société parisienne : chez la baronne de Caters, il fait la connaissance de François Coppée, Jules Barbey d’Aurevilly et Paul Bourget qui deviendront ses amis les plus intimes.

Richard d’Ivry fait aussi la connaissance de Jules Massenet et Léo Delibes avec qui il entretiendra des relations de grande proximité. Il est également proche ami de Jules Verne , dont les opinions politiques sont pourtant à l’opposé des siennes. A partir de ce moment, la carrière du marquis va prendre un tournant, car, pendant presque vingt ans, il se consacre à son œuvre majeure : Les Amants de Vérone.

A partir des années 1870, il écrit davantage d’œuvres religieuses et notamment en 1873 : L’Hymne Français et Les Litanies de la Délivrance , cantique à Notre-Dame de Lourdes.

Son dernier opéra est Persévérance d’Amour, qu’il commence à composer vers 1888. Cette œuvre est un opéra en quatre actes inspiré d’un conte drolatique de Balzac. Comme à son habitude, le Marquis écrit le livret et la musique.

Au terme d’une vie entièrement habitée par la musique, Paul de Richard d’Ivry s’éteint à Hyères, où il est en villégiature, le 16 décembre 1903 auprès de Paul Bourget. Celui-ci écrit, alors qu’il veille le corps de son ami défunt : « c’était un homme doué de la plus magnifique façon de sentir et généreux dans tous le sens de ce mot si bien fait. Il pensait juste en toute chose et nous perdons là un compagnon d’idées bien rare . ».